Dans le camp de concentration du Struthof, le tourisme mémoriel est mis en scène. La chercheuse en archéologie et histoire contemporaine Juliette Brangé nous a présenté les lieux. Elle regrette un décalage entre ce qui est présenté aux touristes et la réalité scientifique, avec des conséquences concrètes.
Le camp de Natzweiler-Struthof en Alsace est le seul camp de concentration nazi situé sur le sol français. Lieu de mémoire ouvert au public, le camp lui-même se visite, ainsi qu’un mémorial et un espace muséographique.
C’est aussi un lieu de recherche, notamment pour les archéologues qui, sous la direction de Juliette Brangé, ont commencé il y a quelques années à en explorer la carrière, où les déportés étaient mis au travail afin d’extraire le granit rose.
Pour la chercheuse, qui prépare une thèse portant notamment sur le Struthof, il existe un écart entre ce qui est présenté aux touristes et les enseignements des travaux de recherche.
Tout d’abord parce que le camp de concentration du Struthof ne ressemble plus beaucoup à celui d’origine, la plupart des bâtiments ayant été détruits, et que la politique mémorielle a mis en avant les résistants déportés, qui n’étaient pas la majorité des prisonniers du camp. Ensuite parce que le camp a continué à être exploité après la Libération, devenant camp d’internement pour des suspects de collaboration avec l’occupant — une partie de l’histoire qui est peu présente dans la muséographie.
Mais les choses changent. Encore peu médiatisées, les fouilles récentes permettent d’entrevoir une partie du quotidien des déportés, celle qui concerne le travail forcé. Elles marquent aussi le début timide d’une coopération scientifique franco-allemande. D’autres sont prévues au sein du camp, dont les archives commencent également à être étudiées.